On préfère souvent les fleurs rouges aux fleurs jaunes. Certes le rouge est une couleur qui se distingue nettement dans la nature et attire l’œil mais le jaune n'est-il pas mis en valeur harmonieusement quand il est entouré de vert ?
Certes, tous les goûts sont dans la nature et la couleur jaune peut déplaire comme la couleur rose : -trop extravagant ? Mauvaise réputation ?- Mais cela n'a pas toujours été le cas...
Dans l'antiquité, le jaune était plutôt apprécié : la couleur jaune est associée au Soleil et par extension la Vie... En Chine, il fut longtemps la couleur réservée à l'Empereur, car symbolique du pouvoir et de la sagesse. En Asie, la couleur jaune est plus généralement associée au bonheur.
En Occident, au Moyen-âge, la couleur jaune fut écartée au profit de la couleur "or", la couleur dorée a fini par avoir toutes les qualités de la couleur jaune. L'or est perçu comme une couleur brillante et réchauffante, au détriment du jaune, qui ne pouvait que s'éteindre, et devenir "le mal aimé".
Il a fallu attendre le 17ème siècle pour que le jaune reprenne place, au sein de la peinture hollandaise et flamande, grâce à l'apparition d'un nouveau pigment : le jaune de Naples.
Et ce n'est qu'au 19ème siècle que la couleur jaune retrouve toutes ses lettres de noblesses ; notamment par sa prédominance dans la palette des impressionnistes. L'art affirme alors ses trois couleurs primaires : le bleu, le rouge et le jaune.
La nuit étoilée (1889) Coucher de soleil à Montmajour (1888)
Vincent Van Gogh (1853-1890) est allé jusqu'à mettre en lumière "la couleur jaune". Le jaune est un élément constant chez le peintre, et se dissémine un peu partout dans ses œuvres expressionnistes, des fleurs, et jusqu'aux couleurs des reflets d'eau. Van Gogh qualifiera ainsi le jaune de "clarté suprême de l'Amour".
Tournesols dans un vase (1889) La maison jaune (1888)
Cette vivacité de couleur était aux antipodes des nuances "grises", très sombres de ses débuts en Hollande (1880-1885). Après deux ans à Paris, Van Gogh finit par découvrir "sa couleur" dans le midi, aux travers de nouveaux paysages à Arles : il y peignit la maison jaune (1888) et les fameux tournesols (1889). Dans sa lettre à son frère Théo il déclara que le jaune est beau "Un soleil est une lumière que faute de mieux, je ne peux appeler que jaune, jaune pâle or... c'est beau le jaune."
Lorsqu'on dit qu’il y a une belle lumière, c'est parce que celle-ci fait resplendir les choses qu'elle éclaire. La lumière n'est belle que lorsqu'elle est incarnée.
François Cheng (Cinq méditations sur la beauté)
Publié par Ranjiva